Décollement rétinien
1. Décollement rétinien rhegmatogène
Présentation
Un décollement qui se produit entre l’épithélium pigmentaire rétinien et la neurorétine consécutivement à une déchirure de cette dernière est qualifié de rhegmatogène. Il peut être soit primaire dans une zone où la neurorétine est plus fragile, soit secondaire (traumatismes, choriorétinites et rétinites, luxation de cristallin, glaucome, lésion iatrogène chirurgicale…). La rétine nerveuse s’amincit à son attache périphérique (ora ciliaris retinae*) oùelle est plus fragile, et des mouvements violents de la tête suffiraient à la déchirer dans ou près de cette zone chez le Shih Tzu ; de même, la neurorétine n’est pas attachée en limite de certains colobome papillaires/péripapillaires. Dans les deux cas, du vitré fluide pénètre dans l’espace sous-rétinien par le trou rétinien et agrandit la déchirure : lors de synérèse vitréenne (voir dégénérescence vitréenne), cela peut conduire à une désinsertion périphérique géante ou rétinodialyse, notamment chez le Shih Tzu à partir de la lésion dorsale initiale; le même phénomène peut être observé dans l’AOC à partir du grade 2 en limite de certains colobomes papillaires ou péripapillaires si la rétine nerveuse non attachée ouvre l’espace sous-rétinien. Les couches rétiniennes externes gardent des propriétés fonctionnelles jusqu’à 6 mois après décollement chez le chien, alors que les modifications histopathologiques sont très rapides chez le chat (quelques heures) avec une dégénérescence significative à l’issue du premier mois. Les signes cliniques observés incluent une mydriase hypo- ou aréflexique, une synérèse vitréenne avec possibles hémorragies, une baisse d’acuité visuelle significative ou une cécité. L’examen complet du fond d’œil ne permet pas toujours de mettre en évidence les petites déchirures périphériques, peut être rendu compliqué par l’opacification des milieux oculaires. Les signes cliniques peuvent être uni ou bilatéraux.
Prédispositions raciales
Les races canines prédisposées sont celles où la synérèse vitréenne est rapportée (voir dégénérescence vitréenne) et le Retriever du Labrador, ainsi que celles dans lesquelles l’AOC est décrite. Des trous rétiniens atrophiques sont observés dans certains cas de dysplasie rétinienne géographique.
Moyens diagnostic / examens complémentaires
Les données épidémiologiques, les éléments cliniques observés ainsi que l’échographie oculaire (examen de choix) permettent d’identifier les signes du décollement rhegmatogène.
Traitement
Seul un traitement chirurgical peut être proposé, à condition que le décollement ne soit pas trop ancien, surtout chez le chat. Pour les cas d’atteinte limitée (petites déchirures, dysplasie rétinenne géographique avec trou rétinien), la rétinopexie** transpupillaire à l’aide d’un laser est l’indication de choix. Dans les cas de décollement important il est nécessaire de recourir à des techniques associant vitrectomie, si besoin réapplication après libération d’éventuelles brides vitréennes, injection d’huile de silicone et rétinopexie. Dans certaines races (Bichon à poil frisé, Shih Tzu…), une rétinopexie transsclétale au laser diode à 9 mm du limbe est recomandée avant d’effectuer une exérèse du cristallin pour prévenir d’éventuelles complications de décollement rétinien rhegmatogène pérppihérique.
*ora ciliaris retinae : limite antérieure ciliare de la rétine
**rétinopexie : fixation de la rétine nerveuse aux couches sous-jacentes
2. Décollement rétinien exsudatif idiopathique
Présentation
Ces décollements sont idiopathiques, complets, bilatéraux, non rhegmatogènes*. Ils induisent une cécité soudaine sans origine précise actuellement identifiée; ils répondent au traitement corticoïde par voie générale et sont qualifiés de cortico-sensibles. L’accumulation de fuide sous-rétinien est responsable de la dissociation entre la rétine neurosensorielle et l’épithélium pigmentaire rétinien sous- jacent. L’origine reste actuellement indéterminée. Typiquement, les animaux atteints présentent une mydriase aréflexique bilatérale. La rétine, avec ses vaisseaux superficiels, apparaît dans l’ouverture pupillaires comme une membrane grise translucide poussée en avant da ns le vitré ; elle est attachée au nerf optique et en périphérie à l’ora ciliaris. Des hémorragies peuvent être constatées lors de lésions anciennes.
Prédispositions raciales
Cette affection canine semble plus fréquemment rapportée chez le Berger allemand et les croisés de Berger allemand, chez des croisés de Retriever du Labrador; le Berger australien, le Golden Retriever, certains Terriers seraient aussi dans ce cas.
Techniques diagnostiques / examens complémentaires
Le diagnostic est ophtalmoscopique chez des chiens à cécité soudaine. On peut avoir recours à l’échographie oculaire afin d’évaluer la topographie exacte du décollement. Le diagnostic différentiel doit être fait avec un décollement rétinien exsudatif consécutif à une maladie générale (examens complémentaires appropriés) où un traitement corticoïde par voie générale serait contre-indiqué.
Traitement
Les décollements idiopathiques cortico-sensibles répondent bien au traitement corticoïde général à dose immunosuppressive commencé le plus rapidement possible (prednisolone per os, 2 mg/kg/jour pendant 7 jours puis 1 mg/kg/jour pendant 10 jours, au minimum) jusqu’à la récupération visuelle qui se fait en moyenne en 3 semaines lorsqu’il n’y a pas d’hémorragies, dont la présence diffère au moins la ré-application de la neurorétine.
*décollement rétinien rhegmatogène : dont la neurorétine comporte une déchirure.