Luxation de la glande lacrymale accessoire
Présentation
La glande lacrymale de la membrane nictitante, également appelée glande lacrymale accessoire, est normalement située à la base de la face bulbaire de la membrane nictitante. Elle est fixée au tissu périorbitaire par une gaine de fascia qui se trouve à la base du cartilage de la membrane.
La glande lacrymale participe pour environ un tiers de la production de la partie aqueuse du film lacrymal.
Le terme de glande de Harder ne devrait pas être utilisé pour décrire cette glande qui n’existe tout simplement pas chez le chien et le chat mais est présente chez l’Homme et le lapin par exemple.
La luxation (ou prolapsus) de la glande lacrymale accessoire peut être unilatérale ou bilatérale, mais souvent différée de quelques jours à plusieurs mois. Elle est fréquente chez les animaux jeunes (de quelques semaines à 1 an) et exceptionnelle après l’âge de 2 ans.
Initialement intermittente avec une glande luxée visible à certains moments, la luxation devient permanente assez rapidement.
Cliniquement, on observe une masse rosée à rouge faisant saillie en arrière de la membrane nictitante au canthus interne. La taille de la glande luxée est variable en fonction de la race du chien, de la durée d’extériorisation et de l’inflammation conjonctivale qui accompagne la luxation.
Le terme anglais de «cherry eye » (œil cerise) exprime bien l’aspect que prend une glande luxée.
Une conjonctivite folliculaire (hyperplasie lymphoïde visible sur la face bulbaire de la membrane nictitante) et une éversion du cartilage de la membrane nictitante peuvent accompagner la luxation de la glande. Un épiphora séreux est souvent associé. Il peut devenir muqueux à muco-purulent avec le temps si la sécrétion lacrymale est affectée.
L’affection est généralement non douloureuse.
La sécrétion lacrymale de la glande peut diminuer voire disparaître avec le temps si une intervention n’est pas effectuée. Ainsi une KCS peut s’installer, et ce d’autant plus que de nombreuses races prédisposées à la luxation de la glande lacrymale le sont également à la KCS.
Bien que l’étiologie exacte ne soit pas connue avec certitude, une origine multifactorielle et en particulier génétique est probable avec une fragilisation des attaches de la glande.
Prédispositions raciales
De très nombreuses races de chiens sont prédisposées comme les Cane Corso, les Mâtins de Naples, les Mastiffs, les Dogues Allemands, les Cockers, les Bouledogues Anglais, les Epagneuls, les Shih Tzu, les Pékinois…
L’affection est très rare chez le chat. Les Burmeses et les Persans seraient prédisposés.
Moyens diagnostics / examens complémentaires
Le diagnostic est essentiellement clinique. Il est le plus souvent facilement établi surtout lorsque l’animal est présenté rapidement. Chez les chiens de grandes races, une éversion du cartilage de la membrane nictitante peut être confondue avec une luxation de la glande lacrymale et les 2 affections peuvent être concomitantes. Il est parfois nécessaire d’anesthésier l’animal pour établir le diagnostic définitif en cas de doute.
L’examen oculaire peut être complété d’un test de Schirmer pour vérifier la sécrétion lacrymale, surtout chez les races prédisposées à la KCS.
La réalisation du test à la fluorescéine n’est normalement pas nécessaire, sauf en cas de douleur associée.
Traitement
De nombreuses personnes (propriétaires ou éleveurs) replacent la glande en arrière de la membrane nictitante à l’aide d’un coton-tige mais cette solution ne peut être que très transitoire.
Le traitement est chirurgical et consiste à repositionner la glande lacrymale de manière pérenne à la base de la membrane nictitante.
Il existe 2 techniques principales :
- La technique d’enfouissement de Morgan qui consiste à enfouir la glande dans une poche sous la conjonctive bulbaire de la membrane nictitante. Cette technique est largement répandue et comprend de nombreuses variantes en fonction des chirurgiens
- La technique d’ancrage de la glande lacrymale au périoste orbitaire, qui est légèrement plus difficile et peut limiter les mouvements de la membrane nictitante à terme.
Un traitement anti-inflammatoire préalable à la chirurgie par voie locale et générale peut aider à la réussite chirurgicale. Ce traitement doit être poursuivi en post-opératoire, en évitant les corticoïdes locaux qui pourraient limiter la cicatrisation et favoriser la reluxation de la glande.
L’ablation chirurgicale de la glande lacrymale est contre-indiquée car le risque de sécheresse lacrymale est très important.